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Reportage Politique : Olivier Maingain, président général du parti DéFi (1 ère partie) : “Bruxellois, maître chez toi!”

Date : 01/04/2017

Lieu : Salle du Collège Communal de Woluwé-Saint-Lambert

Présents : Olivier Maingain + Erkan Ozdemir

Durée : 11h15-12h15

Technique : Enregistrement + transcription du parlé

La Manchette : Mr Maingain, pouvez-vous nous dire qui vous êtes exactement ?

Olivier Maingain : Je suis issu d’une famille dont le père était fonctionnaire et maman au foyer. Une famille de classe moyenne mais pas du tout nanti. Mes parents n’ont pas de patrimoine immobilier et n’en ont pas davantage aujourd’hui. Toute leur vie a été la promotion scolaire de leurs enfants car il fallait passer par une bonne formation pour avoir une bonne profession.

J’ai fait toute ma scolarité au Collège Saint-Michel. Ceci n’impliquait pas forcément un choix religieux. Je suis athée par ailleurs. Puis, j’ai par la suite étudié à l’ULB, à la faculté de droit. Brièvement, je suis passé quelques années au barreau de Bruxelles. Ce n’est pas que cela ne m’a pas intéressée mais j’ai été très vite pris dans l’engrenage de la politique qui m’intéressait beaucoup.

Très tôt, j’étais  déjà en contact avec madame Antoinette Spaak (doyenne du parti FDF et DéFi) et d’autres dirigeants historiques de mon parti à l’époque. Le message était qu’il fallait préparer la génération suivante de ceux qui avaient été les fondateurs du parti FDF à l’époque ; la nouvelle génération du parti qui sera d’ailleurs composée avec Didier Gosuin, Bernard Clerfayt, Martine Payfa et tant d’autres.

En sommes, la création de la région bruxelloise et des premières régionales ont permis à cette génération nouvelle, à l’époque nous n’avions qu’une trentaine d’années, d’avoir le pied à l’étrier et on a été propulsé au-devant de la scène politique. On était d’ailleurs les premiers députés régionaux du FDF à l’époque. Donc la vie politique m’a très vite happé.

Alors, j’adhérais à ce parti pour de multiples raisons.

L’histoire du parti : pour bien la comprendre, il faut accepter quelques fondations :

  1. Ce n’est pas un parti de défense des francophones. C’est un parti qui refusait le nationalisme flamand et ses menaces sur Bruxelles. J’ai toujours considéré qu’il s’agissait d’un parti de citoyens libres, libres de toute attache à des groupes de pressions, à des piliers confessionnels, c’est vraiment un parti libertaire.
  2. Et, à cette dimension de l’entrée du nationalisme flamand sur la Belgique et notamment de cette menace sur Bruxelles, s’ajoutait aussi aux bruxellois la volonté de se réapproprier la gestion de leur région et communes par les flamands. Car pendant longtemps, l’Etat belge ne concevait Bruxelles que comme une ville purement administrative ! Une ville qui devait accueillir toutes les institutions de l’Etat et donc il fallait faciliter la vie de ceux qui devaient venir travailler à Bruxelles mais pas de faciliter la vie de ceux qui vivaient à Bruxelles. Et, il y a eu des quartiers entiers abandonnés, une paupérisation d’une partie des quartiers, une conception de la mobilité qui était tout simplement des autoroutes pénétrantes dans Bruxelles et nous avons fait partie de ceux qui ont dit : maintenant ça suffit ! Bruxelles doit se faire respecter. Cette ville doit vivre pour ses habitants et par ses habitants.
  3. Le troisième aspect qui m’a fortement motivé et souvent avec Didier Gosuin et est souvent sujet à discussion ; on fait partie de cette génération des jeunes bruxellois qui se sont dits : mais sommes-nous encore maitre chez nous ? D’ailleurs un des slogans qui a fait succès à mon parti à l’époque était : Bruxellois, maître chez toi ! ce n’est pas un rejet des autres mais tout simplement une manière de dire : on ne va quand même pas faire en sorte que cette ville ne soit qu’un district administratif ! Certains d’ailleurs disaient qu’on va faire de Bruxelles, le Washington de la Belgique et même peut être de l’Europe ! Une ville de pure service administratif et le soir tout le monde la déserte et ça devient ainsi ce que l’on connait à Washington dans certains quartiers ! C’est-à-dire, l’insécurité et l’abandon total de la population en substance.
  4. Quatrième chose intéressante était cette dimension au-delà de réappropriation de Bruxelles, il y a la dimension environnementale. On a été très prospectif sur la conception du développement durable. On avait des grands noms de l’écologie urbaine qui nous ont accompagnés, notamment le professeur Vignault de l’ULB avec quoi nous avons été très à la pointe d’une conception nouvelle de la gestion d’une ville, en terme de mobilité, d’environnement, et d’urbanisme.
  5. Et dernier aspect qui m’a beaucoup plu dans ce parti, c’était son pluralisme philosophique et religieux.

C’était un parti qui ne vivait pas en référence avec les piliers traditionnels de la société belge : le monde professionnel catholique, le monde libéral, le monde de l’athéisme.

Le fait que c’est un parti qui sait réunir des gens de confessions, d’opinions philosophiques très différentes et qui considèrent à un moment donné que la citoyenneté, – d’ailleurs, j’ai hésité à mettre le mot de « citoyenneté » au nouveau nom du parti – pourquoi? parce que la citoyenneté, c’est d’abord la reconnaissance que quelles que soient vos origines, quelle que soient vos appartenances philosophiques religieuses, d’où que vous veniez, si vous êtes un citoyen à part entière comme tout autre citoyen, vous êtes reconnu dans le coté égalitaire de la condition humaine et c’est ça le plus important à mes yeux !

On l’oublie souvent mais c’est le premier parti qui a eu le tout premier élu d’origine étrangère sur une liste communale à Bruxelles en 1970, un journaliste du Soir M. Attar. Et donc, on a toujours eu, dans notre histoire, une ouverture en disant cette ville appartient à tous ceux qui y vivent et veulent en faire un projet commun. Bruxelles, ce n’est pas l’apanage d’une seule partie de la population mais de tous ceux qu’y vivent. Il faut donc redonner un dynamisme culturel, social et associatif. Voilà, un peu le parcours qui a fait que je me suis engagé dans ce parti qui était très amateur et qui le reste !

Je dis ça parce que j’ai encore récemment rencontré des jeunes de quartier à Molenbeek et qui disaient : il y a quelque chose de différent avec votre parti ! Quand on voit les autres partis, ce ne sont que des machines à conquérir le pouvoir, l’obsession, c’est en être, avoir le pouvoir pour le pouvoir ! Même si on ne sait pas toujours de ce qu’on en fait du pouvoir, mais vous vous parlez d’autres choses et ce qui fait notre originalité.

La Manchette : Combien de temps que vous êtes dans la politique ?

Olivier Maingain : Militant actif de mon parti depuis milieu des années 70, j’ai été élu la toute première fois conseiller communal à la ville de Bruxelles en 1988 où j’ai commencé mon parcours politique. Puis, député régional en 1989, et je suis passé au parlement fédéral en 1991. En outre, je suis revenu en 2004 à Woluwe st Lambert où je suis devenu bourgmestre en 2006.

La Manchette : Alors pourquoi « DéFi » ?

Olivier Maingain  : Parce qu’ il était de tourner la page, non pas d’abandonner (ce qui avait justifié la création de mon parti à l’époque) mais qu’à la suite de notre rupture avec le MR, on s’est dit qu’il faut que les gens soient convaincus que nous sommes un parti actuel. Un parti, qui ne vit pas sur uniquement l’histoire de la rébellion des bruxellois face à tous les dangers que je l’ai dit plus haut, mais que nous allons traduire nos actes dans une dynamique nouvelle.

Par ailleurs, notre séparation avec le MR nous a été bénéfique à tous points de vues. Quand je vois ce qu’est devenu le MR, son alliance avec la NVA, ses mœurs politiques dégradées, quand on voit à Liège ce qui s’est passé avec l’affaire Publifin, finalement le MR se comporte comme le PS, ce sont de vieux partis complétement gangrénés par l’appétit du pouvoir!

Donc, l’équation était de remodeler une société sur un sens de la créativité. C’est-à-dire, l’innovation et de l’esprit d’entreprendre mais pas soumis à la recherche du profit à tout prix) et de comment recréer des solidarités sociales sans tomber dans la société des nouveaux équilibres) que le tout au capitalisme est insupportable et que le tout à l’assistanat social est tout aussi insupportable !

Et, je fais donc souvent le rapprochement avec Macron en France, il y a une certaine convergence d’idée comme le fait qu’ils sont pro-européens comme nous et qu’ils sont à la recherche d’une dynamique nouvelle.

Donc, c’est vrai qu’il faut être innovant et créatif et puis il faut repenser le financement de la sécurité sociale, la fiscalité, il faut repenser un certain nombre d’enjeux sociétaux. C’est donc pour traduire cette dynamique de redéploiement du parti qu’on a voulu changer de nom. On a choisi un nom (d’ailleurs je vois que beaucoup de nouveaux partis en Europe ne s’identifient plus aux vieilles idéologies, ils ne se disent plus libéraux, ni socio-chrétiens, ni socialistes, ni démocrates-chrétiens), ils cherchent à travers un mot l’expression d’une dynamique nouvelle et donc le mot « Défi » nous a apparu séduisant d’abord parce qu’on pouvait le justifier (Démocrate, fédéraliste, indépendant) 3 identités fortes dans le parti mais en plus le mot est très significatif en français, pas peur d’assumer l’avenir : relever le défi, c’est concevoir l’avenir.

La Manchette : Comment expliquez-vous votre secret de la maîtrise des sujets traités ? (Comparaison avec Ahmed Laaouej du PS)

Olivier Maingain : Pour être honnête, je ne maitrise pas tous les sujets, loin de là. Il y a évidemment des sujets sur lesquels je ne m’exprime pas ou peu parce que ce n’est pas ma spécialité et parce que je n’ai pas le temps d’investir dans ces sujets.

Par exemple, la santé publique, je laisse cela à ma collègue Véronique Caprasse. Je ne suis pas expert en santé publique, non pas que cela ne m’intéresse pas intellectuel que du contraire, j’ai un grand appétit intellectuel pour beaucoup de sujets mais il faut avoir le temps. Mais il est vrai que j’essaie d’aborder des sujets sur lesquels par ma formation, par mes lectures et mes centres d’intérêt, je peux m’exprimer en connaissance de cause.

Alors, je tente aussi de concilier technicité et pédagogie. En réalité, j’ai peut-être une carrière d’enseignant rentré, j’aurai fait volontiers un métier de formation et d’enseignement. D’ailleurs, j’avais des profs d’université qui me disaient : faites thèse et doctorat et vous serez professeur à l’université mais je n’ai pas fait cet investissement et je le regrette à titre personnel mais j’étais très pris par la politique à la sortie de l’université.

Et je crois que fondamentalement, on ne peut s’exprime de manière claire et précis sur un sujet qu’à la condition de bien le maîtriser. Donc il faut étudier sa matière. Et j’ai toujours gardé cette exigence intellectuelle dans mon travail politique.

La Manchette : Quelles sont les commissions précisément ?

Olivier Maingain  :Beaucoup en commission de la justice, aussi en commission de l’intérieur et parfois en commission des finances mais plus vers les commissions où ma formation de juriste me sert.

Fin première partie

A Suivre les questions sur le PKK à 1000 Bruxelles …