Festival de Cannes: Coup de projecteur sur l’islamophobie bouddhiste
-« Le Vénérable W », dernier documentaire du cinéaste suisse, Barbet Schroeder donne un coup de projecteur sur les violences subies par les Musulmans au Myanmar, en esquissant le porterait du leader bouddhiste extrémiste Wirathu.
AA/ France / Qualid Filsde
Un documentaire consacré à Ashin Wirathu, le leader bouddhiste extrémiste birman, a été présenté au Festival de Cannes, en France. Il s’agit du film « Le Vénérable W », réalisé par le cinéaste suisse Barbet Schroeder. Un nouveau coup de projecteur sur les violences et destructions causées par l’islamophobie, au Myanmar, un pays dont l’écrasante majorité de la population est bouddhiste.
Le film, d’une durée d’1h47 min, a été projeté samedi en séance spéciale de la sélection officielle du 70e Festival de Cannes. La sortie française du documentaire, co-produit en 2016 par Arte, est programmée pour le 7 juin prochain.
« Partir à la rencontre » de Wirathu « c’est se retrouver au cœur du racisme quotidien, et observer comment l’islamophobie et le discours haineux se transforment en violence et en destruction », indique le synopsis du film.
Avant de rappeler : « Pourtant nous sommes dans un pays [le Myanmar], où 90% de la population est bouddhiste, religion fondée sur un mode de vie pacifique, tolérant et non-violent ».
Tolérant et non-violent ? Sur ce plan, le cinéaste affirme pourtant, dans un entretien publié dimanche par le magazine français « Télérama », que « Wirathu, comme d’autres bouddhistes, a été conditionné par son éducation au rejet du musulman ». « Sa haine envers les musulmans est presque génétique », souligne-t-il.
Le leader bouddhiste birman se retrouve donc une nouvelle fois sous les feux de l’actualité, même s’il ne s’agit pas véritablement d’une première.
En juillet 2013, Ashin Wirathu avait en effet été qualifié de «visage de la terreur bouddhiste» par le magazine américain «Time». C’est que le moine a largement contribué aux persécutions dont sont victimes les Musulmans Rohingyas au Myanmar. L’organisation qu’il dirige, le «mouvement 969», est impliquée dans des actes de violence contre les Musulmans, et prône le boycott de leurs commerces et l’interdiction des mariages interreligieux.
Mais au-delà du rôle du moine bouddhiste fanatique, les autorités du Myanmar, où les Musulmans représentent moins de 5 % des quelques 51 millions d’âmes que compte le pays, ont adopté dès, 1982, une loi qui a fait perdre aux Rohingyas leur citoyenneté. Les voici donc apatrides.
De son côté, le parlement du Myanmar avait ratifié, en mai 2015, une loi limitant les mariages interreligieux, en dépit des protestations des organisations des droits de l’Homme qui dénoncent une nouvelle vague de discrimination à l’égard des Musulmans.
Autant d’éléments qui ont incité l’Organisation des Nations Unies à considérer cette communauté, comme étant « la plus opprimée au monde ».
Ainsi, le Haut-Commissariat de l’ONU aux droits de l’homme avait fait état, dans un rapport publié en février dernier, « d’effroyables récits décrivant des femmes et des jeunes filles violées, des hommes brûlés ou encore des bébés et des enfants massacrés à coups de couteau ».
Le rapport a cité « le cas d’une fillette tuée alors qu’elle tentait de protéger sa mère d’un viol », relevant, dans une autre situation, qu’un « bébé de huit mois est décédé pendant que cinq officiers abusaient de sa mère ».
Ce qui n’empêche pas Wirathu, de continuer à attiser la haine par ses discours enflammés, et les vidéos diffusées par son organisation contre les Musulmans du Myanmar. Son mouvement ouvertement raciste, soutient en effet qu’il vise « la protection de la race et de la religion ».
A cet égard, Barbet Schroeder déclare sans ambages, dans une émissions diffusée sur la chaine de télévision « France 3 », dimanche, que Wirathu « fait un petit peu un programme nazi des années 1930 ». Sauf que la cible toute désignée, cette fois-ci, ce sont les Musulmans.