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EYAD : à la découverte du projet : « Où sont les belges ? »

C’est vrai que la question est assez interpellant ! Question à laquelle on pourrait répondre tout simplement : Beh, en Belgique, tiens !

La réponse est à mitiger plus en profondeur. Quand une personne est primo-arrivante et qu’elle atterrit dans des communes comme Schaerbeek ou Saint-Josse, rien n’est aussi évident que de se poser la question en objet de ce projet.

Il est clair que ce n’est (et la plupart du temps, c’est regrettable) ni dans certains quartiers schaerbeekois, ni à Saint-Josse que l’on se sente vraiment dans ce plat pays.

Jadis, Jacques Brel chantait « Le plat pays qui est le mien » mais comment faire mien un pays qui n’est autre qu’un archétype microcosmique du pays d’origine ?

La conférence sur le sujet est tout simplement profondément d’actualité avec les vagues migratoires actuelles.

Eyad définit ce projet en indiquant que : « Les participantes de nos “Tables d’expression citoyenne” sont parties d’un constat récurrent : « En venant habiter en Belgique, nous pensions côtoyer beaucoup de Belges mais on en rencontre finalement très peu ».

Avec humour, elles ont cherché à comprendre où ils se cachaient ? Ainsi, le projet « Où sont les Belges? » a pris forme.

Grâce à une collaboration avec l’asbl Média Animation, une version multimédia de ce voyage dans leurs représentations de la belgitude est en cours de réalisation : une bouteille à la mer dans laquelle les participants ont glissé un souhait de rencontre et de partages des cultures.

L’excellente professeure à la faculté de Philosophie et Sciences Sociales de l’Ulb, Anne Morelli (docteur en histoire contemporaine) embraye le sujet par la conférence « Y a-t-il un Belge dans la salle ? »

Etonnement et très habile dans son propos, Anne Morelli s’est basée sur l’ouvrage «L’histoire des étrangers et de l’immigration en Belgique, de la préhistoire à nos jours ». Elle est arrivée en quelques coups de manivelles à prouver que l’Homme est construit sur des générations de migrations perpétuelles. Par exemple, un pèlerin était une personne qui, pour purger une peine coulée en force de chose jugée, devait migrer sur d’autres contrées. Ce pèlerinage pénitentiel était, à l’époque médiévale, une espèce d’expiation qui présentait des difficultés pratiques du voyage (fatigues et dangers de la route).

L’Histoire de l’immigration belge notamment des turcs et des marocains a été initiée sur base d’un constat d’échec avec d’autres pays qui intégraient déjà les notions de syndicats et de droits des travailleurs (comme l’Algérie ou la Tunisie).

C’est donc fatalement en dépit des droits sociaux déjà connus par certains que la Belgique lance l’hameçon à la main d’œuvre turque et marocaine, pas chère et obéissante.

L’Eldorado est promis, des allocations inexistantes dans les pays d’origine des ouvriers, des habitations dernier cri, bref tout est mis dans des prospectus afin de faire miroiter des conditions de vie luxueuse.

Le désenchantement s’est évidemment fait aussi vite que les papiers de permis de travail ont été délivrés. Des taudis pour habitation, un travail dont les belges ne veulent pas, un travail de gueux, des conditions de vie déplorables.

Les débats ont été animés par Nathalie Caprioli (Responsable de rédaction à l’Agenda interculturel, journaliste à MICmag).

La soirée s’est soldée par un partage de sandwich et un verre de l’amitié.

Erkan Ozdemir / La Manchette