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Fête du Sacrifice 2021 : entre slalom juridique et négociations de l’EMB !

La population musulmane de Belgique célèbrera la Fête du Sacrifice (« Aïd El Adha ») probablement le mardi 20 juillet 2021.

Depuis plusieurs années, l’abattage rituel lié à cette fête importante dans le calendrier musulman fait l’objet de nombreux débats qui ont abouti à l’interdiction de tout abattage rituel sans étourdissement dans les abattoirs temporaires et agréés en Région flamande (depuis le 1er janvier 2019) et en Région wallonne (depuis le 1er septembre 2019).

En revanche, il est encore possible de procéder au sacrifice sans étourdissement en Région de Bruxelles-Capitale. Les particuliers sont invités à prendre contact avec des professionnels (bouchers), seuls à bénéficier des services de l’abattoir agréé, situé à Anderlecht.

RAPPEL CHRONOLOGIQUE DES FAITS

L’abattage rituel sans étourdissement, exercé en Belgique depuis toujours et défendu par l’Exécutif des Musulmans de Belgique, s’est donc vu remis en question par l’évolution de la législation du pays. L’observance de ce rite dans et en-dehors du cadre de la Fête du sacrifice est dès lors devenu extrêmement compliquée, voire impossible, pour les fidèles musulmans puisque l’abattage rituel sans étourdissement n’est encore autorisé qu’en Région de Bruxelles-Capitale.

Suite à cette interdiction, le Conseil de coordination des institutions islamiques de Belgique (CIB) a entrepris des actions en justice à l’encontre des décrets flamand et wallon.

Pour rappel, le CIB est une plateforme citoyenne composée d’institutions, fédérations, organisations et coupoles de la communauté musulmane de Belgique : le Rassemblement des Musulmans de Belgique, la Diyanet de Belgique, la Fédération Islamique de Belgique, la Fédération des Mosquées Albanaises de Belgique et l’Association Islamique Africaine de Belgique.

Concernant le décret flamand, le CIB a estimé que la décision de ne plus autoriser l’abattage sans étourdissement constituait une violation de la liberté de culte. Le Tribunal de première instance de Bruxelles s’est prononcé le 25 juillet 2016 : il a estimé que cette interdiction enfreignait effectivement la liberté de religion. Cependant, comme le Ministre flamand en charge du Bien-être animal se référait à un règlement européen, le Tribunal a posé une question préjudicielle à la Cour de justice de l’Union européenne.

Dans son communiqué publié le 29 mai 2018 suite à l’arrêt rendu par la Cour de justice de l’Union européenne diffusé le même jour sur la question des sites temporaires, le CIB a annoncé que « l’interdiction absolue de l’abattage sans étourdissement, adoptée en 2017 en régions flamande et wallonne, avait été contestée devant la Cour Constitutionnelle ».

Le 4 avril 2019, la Cour constitutionnelle a décidé de demander à la Cour de Justice de l’Union européenne de statuer à titre préjudiciel sur la validité de l’interdiction générale de l’abattage rituel en Flandre.

La Cour constitutionnelle a estimé que l’interdiction de l’abattage rituel peut être contraire au règlement européen qui stipule que les animaux ne doivent pas être étourdis au préalable s’il s’agit d’un abattage rituel ayant lieu dans un abattoir agréé.

En ce qui concerne le décret wallon sur l’abattage avec étourdissement, la Cour constitutionnelle a constaté que les recours formés contre celui-ci ont depuis perdu leur raison d’être car le législateur wallon a remplacé le décret d’interdiction d’origine par un décret identique incluant la procédure d’abattage dans un nouveau code sur le bien-être des animaux (Code wallon du Bien-être des animaux). Ainsi, l’adoption de ce nouveau décret par le législateur wallon a contraint le CIB à lancer un nouveau recours.

En décembre 2020, la Cour de Justice de l’Union européenne a rendu un arrêt sur la compatibilité de l’interdiction flamande de l’abattage rituel avec le droit européen, renvoyant la balle à la Cour constitutionnelle belge. La Cour de justice a en effet jugé que le décret flamand interdisant l’abattage sans étourdissement était admissible au regard du droit européen. Selon la Cour, le décret flamand se limite à un aspect de l’acte rituel spécifique de l’abattage, à savoir l’obligation d’étourdissement, et donc, toujours selon elle, le décret flamand ne peut être interprété comme une interdiction absolue de l’abattage rituel.

La Cour constitutionnelle belge devra encore évaluer si le décret flamand est compatible avec nos propres dispositions constitutionnelles belges, qui offrent une protection plus large que les constitutions de nombreux autres États membres.

L’Exécutif des Musulmans de Belgique ne cesse de multiplier les contacts avec les autorités et reste très clair sur sa position concernant l’abattage rituel sans étourdissement. Il continuera à mener les discussions afin de permettre à la communauté musulmane de vivre sa religion dans les meilleures conditions, dans le respect de la loi et des convictions de chacun.e.