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Analyse: Attentats à Bruxelles : 1 an déjà et plus jamais ça !

Il y a des dates d’anniversaire que l’on essaie d’oublier mais ce serait encore une fois de ne plus faire face aux réalités.

Daesh est une réalité en Belgique à travers le 22 mars 2016. Après une petite rétrospection rapide des attaques terroristes de l’aéroport de Zaventem et de la station de métro Maelbeek, nous pouvons aisément dénoncer le phénomène de « bashing » européen à l’égard de la Belgique.

Le phénomène est ainsi nommé. Il s’agit là d’un lynchage médiatique sur base de quelques terroristes dont le repère se trouve à Molenbeek, une commune de Bruxelles. C’est la raison pour laquelle, la Belgique a accusé tous les maux de la terre suite aux attentats de Paris jusqu’à ce que Bruxelles subisse le même traitement. Un mal pour un plus gros mal ?

Inutile de revenir sur les pertes humaines et économiques suite aux scènes apocalyptiques auxquelles tout le monde a pu assister à travers les interminables « flash » infos et reportages diffusés en boucle désormais. Cela n’enlève rien aux douleurs insatiables des familles de victimes pour lesquelles nous avons fatalement sans cesse ce sentiment de désolation mitigée par un « ouf » légitime de ne pas se trouver à leur place.

Par ailleurs, suite aux investigations de la commission parlementaire des attaques terroristes du 22 mars, on a pu découvrir – cela devient désormais une habitude d’ailleurs – des dysfonctionnements dans la gestion des attaques. Ils sont de tout genre, linguistiques d’abord, disponibilité des véhicules d’intervention pendant le PIM Maxi (plan d’intervention médicale Maxi), les dispositions à prendre pour les transports en commun, bref, cela va dans tous les sens.

Bruxelles a malheureusement été paralysée pendant plusieurs semaines. Cette période d’incertitude planante a été nécessaire pour panser les plaies et aussi remettre tout d’équerre pour ainsi reprendre un semblant de train de vie. Effectivement, le musulman a été et est toujours le centre des débats. Par extension, le wahhabisme est, peut-être à juste titre, le tremblement de terre qui cause le tsunami. Mais comme le dit Sébastien Boussois dans un papier dans « Le Monde » : l’expansion idéologique et religieuse du wahhabisme touche l’ensemble des pays européens et au-delà depuis plus de trente ans. Alliée des Etats-Unis depuis 1945, rempart contre la contagion chiite depuis 1979, gardien des lieux saints de l’Islam, donc interlocuteur incontournable, l’Arabie saoudite est aussi un bon client en termes d’équipements militaires, notamment avec la France. Après, comment s’étonner que la menace se retourne contre nous ?

Il y a là certes une interrogation des plus importantes mais aussi une extrapolation à faire par rapport au laxisme de la Belgique contre les combattants partis sur la ligne de front au Proche-Orient. En effet, il n’est un secret pour nul que les combattants belges en partance pour la Syrie ont été quasi félicités par gouvernement pour qu’ils quittent le territoire à partir de la première vague de départs en 2012. L’objectif étant à cette époque de combattre contre l’Union soviétique en Afghanistan, la seconde vague concernait les conflits bosniaque, tchétchène ou philippin et la troisième avait suivi l’invasion américaine de l’Irak. Rappelez-vous de Muriel Degauque, une citoyenne belge ayant acquis une certaine notoriété en devenant la première femme européenne auteure d’un attentat-suicide au nom de l’Etat islamique.

Selon Rik Coolsaert, professeur en relations internationales à l’université de Gand et auteur d’une étude récente au sujet des combattants étrangers, cette attirance à la guerre « sainte », qui touche des jeunes plus jeunes qu’auparavant, est démultipliée par l’implication de réseaux amicaux ou familiaux.

Peut-on, alors, parler d’un retard dans la gestion-réaction  de la Belgique face à ce fléau du radicalisme ?

« On a réagi trop tard en matière de radicalisation. Je crois que les Services de renseignements et de police ont un très bon niveau d’information, donc depuis plusieurs années, il y a une collaboration extrêmement étroite entre différents Services de police et de renseignements mais depuis l’adoption du “plan radicalisme” en 2006, ce qui a toujours manqué en Belgique, c’est ce volet préventif !

Comment empêcher cette radicalisation de prendre forme et alors, je ne parle même pas de radicalisation religieuse, c’est une radicalisation d’ordre politique, comment empêcher que certains jeunes et moins jeunes, parce qu’il y en aussi qui ont 30 et plus, ne se radicalisent politiquement jusqu’au point où ils deviennent extrémistes et jusqu’au point ou alors, ils deviennent terroristes. » déclarait à juste titre encore le professeur gantois spécialiste de ce phénomène dans une interview donné à la rtbf.

Le radicalisme politique serait donc le point de départ de beaucoup de maux de manière générale en Europe. Le français Alexandre Ledru-Rollin se retournera dans sa tombe en apprenant les dérives thématiques qui ont pris origine à partir de cet angle de vue.

Pour compléter l’information avec un peu d’histoire, nous nous accordons à dire qu’alors même que le radicalisme apparaît au cours des années 1840 comme une des réponses possibles à la société industrielle qui est en train d’émerger en France. Il trouve un porte-parole en Alexandre Ledru-Rollin qui en diffuse les idées lors de sa campagne électorale, puis dans son journal La Réforme. Son thème fondamental est l’instauration de la démocratie politique mise en œuvre par le suffrage universel, afin de parvenir par ce moyen « aux justes améliorations sociales ».

A partir de ce postulat, et quand bien même que trop souvent, le radicalisme risque de dériver de la fidélité à un modèle aimé vers la détestation de ceux qui en adoptent un autre.

François-Xavier Druet, Docteur en Philosophie et Lettres rapporte dans une carte blanche dans Le Vif que : «Dans tous les secteurs de «l’activité humaine se signalent des “radicaux”, des passionnés devenus sectaires, et quelquefois violents. Les religions n’y échappent pas. L’Histoire et l’actualité l’attestent au-delà de la mesure. Le constat peut inquiéter et scandaliser. La plupart des religions ne se donnent-elles pas pour mission de créer des liens entre l’homme et la divinité, entre les hommes face à la divinité ? La religion des “radicaux” n’en est plus une, puisqu’elle renie sa raison d’être : elle divise et tue, au lieu d’unir pour mieux vivre. »

Nous pouvons donc voir une issue intéressante dans l’éviction du radicalisme politique. Déplacer le curseur sur un mouvement citoyen politique qui pourrait ouvrir un éventail d’alternatifs par rapport aux partis traditionnels de gauche et de droite qui n’ont pas pu « draguer » cette frange de la population.

Pour finir cette analyse, nous pouvons aussi allègrement faire une comparaison avec les attentats de Turquie. En effet, l’aéroport d’Ataturk à Istanbul avait aussi accusé les attaques-suicides de trois kamikazes, dont une revendiquée par les Faucons de la liberté du « Kurdistan » (TAK).
Ces attaques perpétrées le 28 juin 2016 avaient mis en émoi l’ensemble du territoire.

Le modus operandi, tout à fait comparable aux attaques de Bruxelles, tamponnait clairement l’appartenance des terroristes au groupe Daesh.

En revanche, la Turquie, fraîchement touchée par ces attentats s’est très vite – voire trop vite – relevée de ses blessures. Le pays a redémarré très vite le processus de reprise à la vie quotidienne une fois les morts identifiés et les blessés éconduits aux différentes hôpitaux de la méga-ville.

Cette différence prend naissance dans une triple cause :

  • La Turquie a été touchée par les attaques la veille de la haute saison touristique donc il fallait être capable d’accueillir la haute affluence en vue de redresser la situation économique au plus vite
  • La Turquie est un pays qui, malheureusement, a pris une habitude de ce genre de situation abyssale au travers des attaques incessantes du PKK, prend donc aussi l’habitude de sortir de cette atmosphère de désespoir que l’Europe accuse lourdement
  • La Turquie ne pouvait pas perdre la face par rapport à sa position de protagoniste principal dans l’intervention en Syrie, sans oublier qu’elle accueille en sus plus de 3 millions de réfugiés syriens sur son territoire

Dans ce même cadre, nous avons pu assister en date du 20 mars 2017 au célèbre débat des présidents de partis français pour les présidentielles 2017 où le joug entre les différents candidats s’est fait de temps à autre très agressif. Nous retenons notamment dans les promesses électorales des candidats qu’il faille donner la priorité à l’augmentation du budget de la Défense à 2% du PIB contrairement à l’engagement pris par la France auprès de l’Otan.

Finalement, nous espérons que la Belgique adoptera aussi ce genre de disposition par rapport au budget de la Défense qui, partant du principe des dérives du gouvernement MR-NVA , a tendance à fondre comme neige au soleil. Comme dirait le Général de Villiers : « On ne gagne pas une guerre sans effort de guerre » !

Erkan Ozdemir