« Washington avance sur une voie dangereuse en soutenant le PYD en Syrie »
AA – Antalya – Tuncay Çakmak – Le ministre turc des Affaires Etrangères, Mevlut Cavusoglu, a critiqué le choix des Etats-Unis de mener une opération conjointe avec le PYD, branche syrienne de l’organisation terroriste PKK, pour reprendre la ville de Raqqa contrôlée par Daech, en Syrie, au lieu de coopérer avec la Turquie.
Le ministre a répondu, dimanche, aux questions des journalistes en marge de la réunion des Pays les Moins Avancés qui se tenaient à Antalya en Turquie.
Cavusoglu a d’abord critiqué les raisons officielles évoquées par les Etats-Unis pour justifier cette offensive contre Raqqa.
Washington affirme que le régime de Bachar al-Assad s’apprêtait aussi à lancer une opération contre Raqqa, raison pour laquelle les Etats-Unis ont appuyé le PYD.
«Ce n’est pas une raison valable pour collaborer avec une organisation terroriste dont le but est de diviser encore plus la Syrie. Les Etats-Unis avancent sur une voie dangereuse avec le PYD», a-t-il dit.
«Alors que si nous avions uni nos forces spéciales, nous aurions pu ouvrir un front depuis Munbic, puis Afrin et avancer vers Raqqa. Mais malheureusement, que ce soit les Etats-Unis ou la Russie, ils ont choisi de travailler avec une organisation terroriste. C’est sur ce point que nous exprimons nos critiques», a-t-il poursuivi.
Par ailleurs, le chef de la diplomatie a dénoncé le retard annoncé par Washington de la livraison du système de roquettes à haute mobilité (HIMARS).
«Malheureusement les Etats-Unis ne respectent pas l’accord que nous avions convenu à ce sujet. Au lieu de respecter leurs engagements, ils vont soutenir le YPG (branche armée du PYD) en arborant ses insignes (sur les uniformes des soldats américains). Ce comportement n’est pas digne d’un allié et n’est pas sincère. C’est de l’hypocrisie», a-t-il dénoncé.
Pour Cavusoglu, les Etats-Unis qui qualifient les relations avec la Turquie «d’alliance modèle», ne doivent pas soutenir une organisation terroriste qui envoie des terroristes et des armes en Turquie.
Selon le ministre, certains pays européens aussi ont une approche semblable avec certains groupes terroristes.
«Désormais, il y a une nouvelle classification dans les organisations terroristes, en plus du classement idéologique, religieux ou ethnique. Maintenant, il y a les terroristes que l’on peut utiliser et ceux que l’on ne peut pas utiliser», a-t-il affirmé.
A une question relative aux dernières déclarations du Président russe, Vladimir Poutine, en faveur d’un réchauffement avec la Turquie, Cavusoglu a déclaré :
«Il dit attendre un geste de notre part. Mais dans ce cas qu’ils répondent positivement à notre proposition de former un groupe de travail pour que nos diplomates cherchent ensemble des solutions pour une sortie de crise, comme nous le faisons avec Israël.»
Concernant les négociations avec l’Union Européenne (UE) sur la levée des visas, le ministre turc a critiqué l’approche « injuste » des Européens.
«Certains pays ont été déclarés membres de l’UE sans avoir répondu à tous les critères que l’on nous impose, et même sans avoir refermé les chapitres 23 et 24. Ce n’est pas l’adhésion que l’on discute mais seulement la libre circulation de nos citoyens. Alors il n’est pas juste de nous imposer autant de conditions», a-t-il expliqué.
Pour lui, alors que la Turquie est attaquée par plusieurs organisations terroristes, il n’est pas concevable qu’elle change de politique contre le terrorisme.
Cavusoglu a rappelé que des experts turcs et européens vont se réunir la semaine prochaine pour discuter à nouveau de la feuille de route à suivre.
Le ministre en a profité pour saluer l’accord trouvé avec la Grèce concernant l’échange « un contre un » au sujet des migrants en mer Egée.
«Grâce à cet accord, le nombre de migrants irréguliers intercepté chaque jour est passé de 6 800 à environ 30. C’est un très grand succès», a-t-il encore dit.
Pour finir, Cavusoglu a estimé que les propos de David Cameron, le Premier ministre britannique, selon lesquels la Turquie n’intégrera pas l’UE avant l’an 3 000, «ne reflètent pas sa position, car l’Angleterre a toujours soutenu notre adhésion».